Le parcours de l’Italie à la Coupe du Monde de Rugby 2023
Le souvenir qui restera
Les confrontations très attendues avec la Nouvelle-Zélande, triple championne du monde, et la France, pays organisateur, resteront longtemps dans l'esprit des joueurs et des supporters italiens, mais pas pour de bonnes raisons. Le moral était pourtant au beau fixe, après une campagne encourageante au Tournoi des Six Nations 2023, une courbe générale ascendante tout au long des deux années de mandat du sélectionneur Kieran Crowley et des premières victoires prometteuses contre la Namibie et l'Uruguay. Cela dit, les entames poussives lors de ces deux rencontres auraient peut-être dû servir de signaux d'alerte, car face aux deux poids lourds de la Poule A, le manque d'engagement physique des Italiens et leurs déficiences dans le jeu au sol ont ouvert les vannes au tableau d'affichage.
L’essai mémorable
La spectaculaire finition d'Ange Capuozzo, chouchou des supporters, à la 48e minute face à la Nouvelle-Zélande, a suscité le plus grand enthousiasme du public lyonnais, mais c'est l'essai de l'infatigable Michele Lamaro, au début de la seconde mi-temps contre l'Uruguay, qui remporte la palme. Menée 17-7 à la pause, l'Italie avait besoin d'une étincelle et c'est sans surprise qu'elle est venue de son capitaine. L'essai de Lamaro a initié une salve de quatre essais en 15 minutes, permettant à l'Italie de remporter la victoire dont elle avait tant besoin (38-17).
La citation à retenir
« Nous sommes là où tout le monde nous attendait, nous avons terminé à la troisième place du classement. Nous aurions pu jouer un rugby différent et probablement limiter l'écart au score, mais ce n'est pas un [style de] jeu qui nous aurait donné l'occasion de gagner non plus. »
Le sélectionneur Kieran Crowley a conquis de nombreux admirateurs lors de son passage à la tête du rugby italien et il n'a jamais eu l'intention de s'écarter de son style privilégiant le jeu à la main. La non-prolongation du Néo-Zélandais, annoncée avant la Coupe du Monde de Rugby, a peut-être contribué à deux dernières sorties un peu décousues, mais en fin de compte, Crowley sait exactement sur quels aspect les Italiens doivent impérativement travailler : « Les équipes au sommet de la hiérarchie ont un jeu fortement basé sur la puissance. Pour obtenir de bons résultats, il faut avoir de la puissance ».
Le joueur phare
Tommy Allan a brillé de mille feux. Seize fois, l'homme dont la mère a également représenté l'Italie s'est emparé du tee et 16 fois il a envoyé le ballon entre les perches. « C'est bien », a déclaré Allan à propos de son taux de réussite de 100 %, avant d'ajouter avec une grimace : « Mais j’échangerais bien ça contre une place en quarts, c’est sûr ».
La révélation de l'équipe
Le troisième ligne centre Lorenzo Cannone, 22 ans, titulaire indiscutable depuis ses débuts en 2022, est au cœur de tout ce qui a poussé Kieran Crowley à souligner, avec un certain regret, lors de sa dernière conférence de presse : « J’aimerais continuer avec ces gars. J’espère simplement qu’on va commencer à les respecter un peu plus. Pour le cycle jusqu’à la prochaine Coupe du Monde, de nombreux joueurs auront déjà 50 ou 60 sélections derrière eux, ce qui va aider. »
Petit côté
L'Italie a été en difficulté dans la Poule A, mais personne ne peut l'accuser de ne pas s'être employée pour tenter de rivaliser avec deux des prétendants au Trophée Webb Ellis le 28 octobre.
En parallèle, les Italiens ont tenu à impliquer les habitants de leur camp de base de Bourgoin-Jallieu en organisant régulièrement des séances d'entraînement ouvertes. En conséquence, des centaines d'écoliers très heureux ont chanté l'hymne officieux du rugby italien, L'Italiano, ce qui est devenu une tradition hautement appréciée. Ensuite, pour tenter d'évacuer la défaite record contre les All Blacks, l'entraîneur Crowley a invité tous ses joueurs à écrire leurs pensées personnelles sur papier, puis à les brûler au cours d'une cérémonie symbolique.
Si l'on peut dire qu'aucun des deux n'a fonctionné - quelqu'un a même suggéré que les Italiens devraient planter une nouvelle forêt après la défaite contre la France -, ils ont certainement ajouté beaucoup de couleurs à la Coupe du Monde de Rugby 2023.
La stat qui impressionne
La vitesse de sortie de ruck. Avant chaque match, les adversaires de l'Italie évoquaient la capacité très enviée de l'équipe à sortir le ballon très rapidement. Mais il y a une différence entre le fait d'avoir conscience de cette qualité et la capacité à la contrer. Les Azzurri ont abordé leur dernier match contre la France avec la vitesse moyenne de sortie de ruck la plus rapide de la compétition, soit 3,13 secondes, et même dans leur défaite 60-7, ils ont réussi à recycler le ballon plus rapidement que les Bleus.
Le verdict
Malgré la fin décevante de l'ère Crowley, le nouveau sélectionneur Gonzalo Quesada a beaucoup de choses à (re)construire. Le noyau dur est jeune, dynamique et offensif, et si l'on en croit ce qui a été répété, ce groupe tirera de nombreux enseignements de son expérience douloureuse en France. La vitesse, la qualité technique et l'inspiration sont là, sans oublier l'efficacité impeccable face aux perches. Si l'ancien entraîneur argentin du Stade français peut y ajouter un peu de pragmatisme et d'agressivité, cette équipe pourrait bien réaliser les prédictions de Crowley et aller loin dans quatre ans.